Renseignement

A voir et à lire :« Naïveté », « déni » : un rapport parlementaire pointe du doigt la vulnérabilité de la France face aux ingérences étrangères


David Commarmond


La délégation parlementaire au renseignement a rendu public son rapport annuel, consacré aux ingérences étrangères et aux moyens à déployer pour lutter contre. Pour les sénateurs et députés membres de la délégation, les puissances étrangères profitent « d’une forme de naïveté et de déni » de la France, contre laquelle il est urgent d’agir.



 Le niveau de menaces d’ingérences étrangères se situe ainsi à un stade élevé, dans un contexte international tendu et décomplexé ». Dans son rapport annuel publié le 2 novembre, la délégation parlementaire au renseignement – composée de quatre députés et quatre sénateurs – a choisi de s’intéresser au sujet des ingérences étrangères en France, « leviers de déstabilisation sans précédent de nos sociétés démocratiques ». Au long de sa centaine de pages, le document s’emploie à caractériser cette menace, en listant les pays les plus menaçants et leurs modes d’action. La suite du rapport pointe les failles qui rendent la France particulièrement vulnérable à l’ingérence, avant de lister 22 recommandations pour y remédier. Les parlementaires de la délégation concluent en suggérant de regrouper ces recommandations au sein d’un projet de loi dédié à la lutte contre les ingérences étrangères, « afin de provoquer un débat public global sur le sujet ».

La France, coupable de « naïveté et de déni »

Une large partie du rapport de la délégation au renseignement cherche à identifier les points qui rendent la France vulnérable aux ingérences. Parmi eux, la méconnaissance de la menace : « Les puissances étrangères profitent d’une forme de naïveté et de déni qui a longtemps prévalu en Europe ». Le rapport affirme ainsi l’urgence de mieux former les décideurs publics, les entreprises et les acteurs des milieux scientifiques et universitaires aux risques d’ingérences.

Une grande partie des 22 recommandations du rapport ont ainsi pour objectif de rendre la France moins vulnérable. Il est suggéré de former les élus municipaux, départementaux et régionaux, « susceptibles d’accueillir des investissements étrangers pouvant constituer le support d’une éventuelle ingérence étrangère », après chaque élection locale. Dans le monde académique, le rapport demande aussi une étroite surveillance des partenariats avec les universités étrangères. Enfin, la délégation réclame un meilleur contrôle des investissements étrangers dans les entreprises françaises. Des dispositions existent déjà pour étudier – et éventuellement bloquer – des investissements étrangers dans les sociétés cotées en bourse à partir du moment où ils concernent au moins 25 % des droits de vote. Depuis le Covid, ce seuil a été réduit à 10 %, niveau auquel la délégation recommande de le maintenir de façon pérenne.  
 
Pour renforcer son arsenal de lutte contre les ingérences, la France fait aussi face à un défi démocratique et devra prendre des mesures « compatibles avec les valeurs d’un système démocratique que sont notamment la liberté d’expression, le pluralisme des médias, la libre concurrence, la transparence, la protection des données personnelles… », pointe le rapport. C’est pour cette raison que la délégation propose de soumettre ses recommandations au vote des parlementaires, en les intégrant à un projet de loi. La balle est ainsi dans le camp du gouvernement pour s’emparer du sujet. Premier signe positif à cet égard : la loi de programmation militaire 2024-2030 prévoit de consacrer 5 milliards d’euros supplémentaires au renseignement, soit un doublement du budget des différents services.

Source : La chaîne Parlementaire
Rose Amélie Bechel

Le rapport Parlementaire (ici)