Santé

Création innovante d’un cursus de Veille stratégique adapté et modulable pour étudiants et élèves en lycée technologique et professionnel de 2003 à aujourd’hui en Béarn


Dr Jacqueline Ysquierdo Hombrecher




Témoignage

Création innovante d’un cursus de Veille stratégique adapté et modulable pour étudiants et élèves en lycée technologique et professionnel de 2003 à aujourd’hui en Béarn
Auteur : Dr Jacqueline Ysquierdo Hombrecher
 

L’enseignement auprès de l’Education nationale et de grandes écoles m’a permis de développer une formation en Intelligence Économique et Veille stratégique. J’ai pu innover en créant des modules variés tout en m’appuyant sur mes expériences pédagogiques acquises dans les ateliers de formation organisés régulièrement par le rectorat de Bordeaux, et aussi par mes années de formation dans le domaine de l’Intelligence Économique et les relations internationales.

Cette formation a fait ses preuves, puisque j’ai pu l’enseigner auprès d’adultes professionnels et étudiants de Master 1 et 2 à l’ESC, à l’UPPA, au CESI de Pau, puis à l’ESAM de Toulouse, enfin auprès d’élèves de l’enseignement secondaire en lycées des métiers, professionnels et technologiques.
Cette formation particulière m’a amené à adapter en permanence mon approche pédagogique selon les domaines, contenus des programmes et centres d’intérêts des publics, aux profils variés, de l’étudiant de LEA au Manager, Ingénieur, et élèves souvent apprentis en lycées d’enseignement professionnel.

A l’ESC comme au CESI, les objectifs de mon enseignement s’organisaient toujours en fonction des modules existants afin de fondre naturellement et harmonieusement l’IE dans le cursus.
A l’ESC de Pau, ma formation faisait partie du cursus Business Intelligence Unit. Les publics curieux et demandeurs m’interrogeaient sans cesse et m’obligeaient à reconsidérer de manière interactive mes pratiques pour exposer les enjeux de l’Intelligence Économique en entreprise.

Parallèlement je devais m’assurer la juste réappropriation des notions en synthétisant la trace écrite au plus précis. Les étudiants devaient prendre des notes et n’étaient pas autorisés d’enregistrer ou photographié les supports. Ainsi je m’assurais de toute leur attention.

Après chaque séance, je confiais la synthèse à des groupes d’élèves différents. Ces derniers me la transmettaient ensuite pour validation par courriel et ainsi de suite. Cette pratique me permettait de vérifier la capacité de chacun de saisir l’information. Il m’arrivait aussi d’exiger une carte mentale en complément pour évaluer leur esprit de logique. Je validais ou pas en apportant des correctifs et je transmettais à tout le groupe le résumé à s’approprier.  
Il était fondamental d’actualiser les contenus des cours (informations, exemples...) et d’organiser la progression articulée autour d’une grille de compétences et descripteurs de qualité à acquérir sur des tâches précises.

En effet, la démarche pédagogique variait selon que j’abordais la veille stratégique associée aux compétences du savoir être, l’Intelligence Economique débouchant sur le savoir-faire versus Ingénierie/Innovation, Management/Echanges Commerciaux, ainsi que Sécurité/Sûreté en matière de protection des données stratégiques.

La dernière phase de notre cursus s’achevait sur la gestion du facteur humain qui caractérise le renseignement souterrain avec les techniques de retournement des cibles pour obtenir l’information grise, pour aboutir au graal du savoir-faire-faire. En effet, la gestion du facteur humain a cette particularité qui oscille entre le renseignement et l’Intelligence Économique, pour lequel il est impératif de transmettre le sens du devoir de réserve dont règle d’or est la neutralité dans l’expression et le comportement afin de mener à bien toute mission d’approche de cibles sans se faire repérer.

L’outil numérique a toujours était le moyen par lequel nous rendions nos cours attractifs en favorisant la projection de vidéos que les apprenants devaient analyser et commenter en îlot tantôt pour décrypter les signaux faibles tantôt pour déduire le sens et synthétiser. Ces exercices se pratiquaient en îlot à l’écrit et sous forme de présentations orales.

Ce qui me paraissait intrinsèque tout au long des formations, était de véhiculer des valeurs communes de sécurité et de loyauté tout en pensant, concevant et élaborant pour la collectivité, ce qui exclut de fait toute attitude individualiste vu que l’objectif est celui de la protection du patrimoine intellectuel de la collectivité, et donc de la France. Les élèves ont parfaitement compris le sens de mon travail et me suivaient naturellement dans mes exigences.

Je devais animer dans la durée l’individu dans le collectif en installant un climat de confiance tout en facilitant les échanges en présence et à distance. C’est ainsi que je me suis employée à entraîner mes apprenants à ne pas céder ni à la critique ni à la défense de position unilatérale, d’une politique ou d’une situation mais de toujours prendre du recul pour trouver les failles d’une stratégie ou d’une situation managériale. En effet, le but était en finale de cibler l’orientation adéquate pour trouver la solution à un problème donné.

 Par la Veille Stratégique, où il est question de recueillir, trier, sélectionner, analyser et enfin synthétiser l’information, le travail consistait en des exercices collectifs permettant d’évaluer la compétence à écouter, lire, échanger au sein d’une équipe, à définir des orientations en partant des consignes ou des exigences d’un décisionnaire. J’habituais mes élèves à adopter une posture distancée afin de mieux maîtriser l’information dans leurs recherches de sources sans toutefois tomber dans la boulimie ou l’anorexie face aux outils numériques comme GOOGLE ou autres agents que je mettais à leur disposition.

L’apprentissage quant à lui, devait être gradué du traitement d’un simple document informationnel à celui de plusieurs documents de différentes sources. J’ai donc conçu un programme adaptable avec des exercices de simulation et théâtralisation pour chacune des étapes de mon enseignement.

Ces étapes obligeaient les apprenants à s’interroger sur leurs recherches en partant d’une feuille de route qu’ils devaient actualiser en permanence après chaque session d’investigation et de mise en commun. La feuille de route contenait les axes des recherches selon les données informationnelles recueillies, les différents outils numériques y compris agents intelligents mis en œuvre, l’évaluation des accès et des sources, la révision des objectifs à mettre en adéquation avec un sujet ou un cahier des charges virtuel.

En un mot la posture consistait en l’observation, l’écoute attentive et l’analyse fine de données pour l’aide à la décision, tout comme l’aviateur dans son cockpit.

Une fois acquis les fondamentaux de la notion d’Intelligence Economique appliquée au monde de l’entreprise et de l’innovation, les groupes d’individus de la classe finissaient par se rejoindre dans les échanges, et peu à peu par devenir des Think Tank auxquels j’allais pourvoir confier des sujets de réflexions plus complexes en matière d’Innovation, Produit, Process et captation de marchés porteurs.

Organisés en îlots, par affinité de compétences et sensibilité, mes élèves devaient fournir un travail minutieux de recherche sur un cas et selon une méthode bien défini de la Veille Stratégique qui leur demandait une rigueur et une précision sans faille.
Cet exercice se faisait sur quatre à cinq séances en lycée et sur un trimestre en grandes écoles pour un rendu écrit et oral de trente minutes avec échanges et débats avec les autres participants. Il y avait toujours un capitaine d’équipe soumis à mes questionnements et conseils qui devait rendre compte au groupe afin d’améliorer la restitution finale. Entre chaque séance, j’avais un contact direct par courriel avec les capitaines de chacune des équipes qui m’adressaient la progression de leur feuille de route.

Je gérais bien souvent plusieurs classes à la fois avec des niveaux différents et je devais m’organiser afin de pouvoir communiquer en temps réel et avec bienveillance mais fermement afin d’encourager un public parfois récalcitrant à l’ordre, la discipline et la méthode.

En conclusion de ces expériences sur des publics différents, j’ai dû remettre en question maintes fois mes pratiques d’enseignement en les réajustant, en concevant des critères et des indicateurs ainsi que des outils de recueil des données, en analysant les résultats, enfin en coordonnant des actions de formation en conséquence.
 
La qualité de la formation primant, les apprenants étaient au centre de toute mon attention et leur appréciation était précieuse. Ces derniers ont permis d’évaluer mon action par une grille d’auto-évaluation dont je tenais compte pour envisager d’autres modélisations par la suite et affiner ma méthode.
 
Dans ce métier de formateur et passeur en IE, l’écoute et l’adaptabilité sont essentiels. Enfin la qualité des apprentissages des élèves reste l’un des critères d’efficacité des actions entreprises. Il faut donc savoir accepter les remarques et répondre avec bienveillance et modération afin de ne jamais rompre le lien social mis en œuvre dès le début de notre action de transmission.
 
En conclusion de ce long exposé sur ma méthode en matière de formation à l’IE, j’ajouterai que nul n’est prophète en son pays et que la force et la détermination à poursuivre mon métier de formatrice, c’est à mes élèves et étudiants que je les dois. Ils ont cru en ma progression et ont eu foi dans la discipline enseignée. Cette méthode a permis à beaucoup de progresser, se révéler par des talents cachés de leader, d’organisateur, de stratège, d’orateur ou d’inventeur.

Je pense que pour parvenir à ce bonheur d’enseigner, peu importe la discipline, il faut aimer ce que l’on fait. Tomas Alvira Alvira professeur émérite en matière de pédagogie nous invite dans l’une de ses multiples conférences, à méditer sur la vocation d’enseigner en ces termes[[i]]url:#_edn1 : « La vocation de l’enseignant va de pair avec le désir de poursuivre, avec détermination et constance, l'éducation de chacun des élèves qui lui sont confiés.  La vocation a pour fondement, la liberté et l'amour. La vocation professionnelle exige la liberté de choix. C'est ce que l'on entend généralement par liberté, avoir le pouvoir de choisir, de décider. Mais ce pouvoir de choix ou de décision doit s'accompagner d'une ouverture, d'une hauteur de vue, celle qui s’oppose à un égoïsme réducteur et liberticide. Celui qui est fermé d'une manière ou d'une autre, se prive de cette liberté. Son égoïsme, sa fermeture d'esprit lui ôte toute liberté. »

A chacun d’en tirer les enseignements qu’il convient.
 
[[i]]url:#_ednref1 ) Tomás Alvira Alvira, Professeur à l’Ecole de la Formation des Maîtres. Conférence prononcée le 13 juillet 1985 à Alicante à l’Ecole de Formation des Maîtres de l’Université Villanueva.
 








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