Des Intervenants de Renommée
Sous la modération de Louise Souverbie, chercheuse à l'IRIS et spécialiste de l'innovation en défense
- Bertrand Gouillard, directeur du pôle innovation ouverte de l'Agence de l'innovation de défense (AID), a détaillé trois grands enjeux stratégiques pour le ministère des Armées :
- Les nouveaux champs de conflictualité (marin, sous-marin, aérien, espace),
- Les menaces émergentes comme les drones,
- Les défis technologiques tels que l’hypervélocité et les armes à énergie dirigée.
- Valérie Merindol, co-directrice de la chaire newPIC à la Paris School of Business, a analysé les défis liés à l'innovation ouverte dans un secteur historiquement fermé comme la défense.
- Marc-Antoine Sanchez, médecin militaire rattaché à l’Agence de l'innovation de défense (AID), a mis en avant les avantages de la coopération civilo-militaire dans le domaine médical, où « les innovations duales trouvent des applications directes des deux côtés ».
- Victor Prémaud, directeur général de Hopper, a présenté les solutions développées par son entreprise pour la réhabilitation des personnes amputées, illustrant les synergies possibles entre innovations civiles et militaires.
L’Innovation Civile : Une Ressource Stratégique pour les Armées
Les discussions ont mis en lumière l'importance stratégique des innovations civiles pour relever les défis sécuritaires et technologiques auxquels font face les armées françaises.
Pour MMe Meridol, c’est un vrai changement de paradigme. “Dans un monde où les avancées technologiques s'accélèrent, il est impératif pour les forces armées de s'ouvrir aux solutions issues du secteur civil”. L’innovation ne va plus exclusivement du militaire au civil. Les relations sont beaucoup plus complexes et le nombre d’acteurs est beaucoup plus important (grands groupes, pme, start-up) avec des motivations différentes. Cette situation engendre des critiques. Pour elle, nous nous dirigeons vers une plus grande porosité entre les deux mondes. Le mot clé étant écosystème. En prenant l’exemple des nouvelles technologies comme l’IA, le Big data, le cyber qui sont des technologies disruptives qui avancent et se diffusent très largement. Elles perturbent et parfois créent des chocs.
M. Bertrand Gouillard de l’Agence de l’innovation de défense (AID) nouvellement crée, il apporte un éclairage institutionnel sur un organisme peu connu du grand public et de professionnels. Avec un budget annuel d’un milliard d’euros, l’AID s’appuie sur un vaste écosystème composé d’universités, de centres de recherche, de start-ups et d’entreprises. Ce réseau permet de repérer, financer et accompagner les projets d’innovation les plus prometteurs pour la défense. Pour lui trois enjeux majeurs, le premier, les nouvelles conflictualités (espace, champs informationnels et cognitifs), le second avec les câbles sous-marins, les drones. Pour lui, un des éléments majeurs de changement est que le danger peut aujourd’hui venir du monde civil. Enfin, l’enjeu technologique doit être pris en compte. La vitesse devient un enjeu stratégique dans les conflits pour frapper en profondeur. Mais on peut citer aussi les armes à énergie dirigée (laser, électromagnétisme), les ordinateurs, calculs et cryptologie quantiques, etc.
Marc Antoine Sanchez de l’Agence de l'innovation de défense (AID) en tant que médecin militaire et officier d'échange innovation pour les services de santé précise sans le nommer, que la conquête spatiale menée par les USA est menée par Space X et non la NASA. Sans les fonds publics, sans les l’appui des ministères l’ambition et les projets seraient impossibles, sans une forte complicité. La situation est donc fortement différente en France, par ses montants et par l’imbrication entre l’Etat et le monde civil. A titre d’exemple, Amazon a eu un budget pour l'année 2023 en RD de 86 milliards d’Euro. En 2024 par trimestre, elle a dépensé 22 miliards soit prèsque deux fois le budget du Ministère de la Défense.
Victor Prémaud de la Société Hopper en tant que DG évoque la mission qu’il s’est donné au sein de son entreprise. Lutter contre les inégalités, améliorer la qualité des soins et l’appareillage. Ces problématiques demeurent. Mais quand on en vient à la pose de prothèses, on pense à des sportifs, des militaires avec des appareillages spécifiques puissants et coûteux. Les jeux Olympiques ont mis en valeur cet éclairage et les très grands progrès réalisés. Mais quand on doit s’adresser au grand public, qui peut avoir besoin d’être appareillé, dans cette hypothèse, les besoins seront différents, la mobilité prime sur la performance, car eux n’ont pas les mêmes priorités, les mêmes possibilité. Et là c’est tout une réflexion qui est à mener en matière de politique publique.
Pour MMe Meridol, c’est un vrai changement de paradigme. “Dans un monde où les avancées technologiques s'accélèrent, il est impératif pour les forces armées de s'ouvrir aux solutions issues du secteur civil”. L’innovation ne va plus exclusivement du militaire au civil. Les relations sont beaucoup plus complexes et le nombre d’acteurs est beaucoup plus important (grands groupes, pme, start-up) avec des motivations différentes. Cette situation engendre des critiques. Pour elle, nous nous dirigeons vers une plus grande porosité entre les deux mondes. Le mot clé étant écosystème. En prenant l’exemple des nouvelles technologies comme l’IA, le Big data, le cyber qui sont des technologies disruptives qui avancent et se diffusent très largement. Elles perturbent et parfois créent des chocs.
M. Bertrand Gouillard de l’Agence de l’innovation de défense (AID) nouvellement crée, il apporte un éclairage institutionnel sur un organisme peu connu du grand public et de professionnels. Avec un budget annuel d’un milliard d’euros, l’AID s’appuie sur un vaste écosystème composé d’universités, de centres de recherche, de start-ups et d’entreprises. Ce réseau permet de repérer, financer et accompagner les projets d’innovation les plus prometteurs pour la défense. Pour lui trois enjeux majeurs, le premier, les nouvelles conflictualités (espace, champs informationnels et cognitifs), le second avec les câbles sous-marins, les drones. Pour lui, un des éléments majeurs de changement est que le danger peut aujourd’hui venir du monde civil. Enfin, l’enjeu technologique doit être pris en compte. La vitesse devient un enjeu stratégique dans les conflits pour frapper en profondeur. Mais on peut citer aussi les armes à énergie dirigée (laser, électromagnétisme), les ordinateurs, calculs et cryptologie quantiques, etc.
Marc Antoine Sanchez de l’Agence de l'innovation de défense (AID) en tant que médecin militaire et officier d'échange innovation pour les services de santé précise sans le nommer, que la conquête spatiale menée par les USA est menée par Space X et non la NASA. Sans les fonds publics, sans les l’appui des ministères l’ambition et les projets seraient impossibles, sans une forte complicité. La situation est donc fortement différente en France, par ses montants et par l’imbrication entre l’Etat et le monde civil. A titre d’exemple, Amazon a eu un budget pour l'année 2023 en RD de 86 milliards d’Euro. En 2024 par trimestre, elle a dépensé 22 miliards soit prèsque deux fois le budget du Ministère de la Défense.
Victor Prémaud de la Société Hopper en tant que DG évoque la mission qu’il s’est donné au sein de son entreprise. Lutter contre les inégalités, améliorer la qualité des soins et l’appareillage. Ces problématiques demeurent. Mais quand on en vient à la pose de prothèses, on pense à des sportifs, des militaires avec des appareillages spécifiques puissants et coûteux. Les jeux Olympiques ont mis en valeur cet éclairage et les très grands progrès réalisés. Mais quand on doit s’adresser au grand public, qui peut avoir besoin d’être appareillé, dans cette hypothèse, les besoins seront différents, la mobilité prime sur la performance, car eux n’ont pas les mêmes priorités, les mêmes possibilité. Et là c’est tout une réflexion qui est à mener en matière de politique publique.
Un écosystème en plein changement.
Mme Merindol introduit dans sa seconde intervention les implications de la notion d'innovation ouverte, soulignant qu'elle implique de collaborer avec un plus large éventail d'acteurs, bien plus large que son acceptation habituelle. Elle identifie trois paradoxes liés à l'innovation ouverte dans le secteur de la défense.
M. Gouillard, de l'Agence Innovation Défense (AID), développe le rôle de l’agence dans la promotion de l'innovation ouverte et la captation de l'innovation civile. L'AID intègre à la fois l'innovation planifiée et l'innovation ouverte, ce qui la distingue d'autres structures. M. Gouillard met en avant l'importance du marché dual pour les start-ups qui collaborent avec la défense, comme gage de sécurité économique et d’indépendance. Il décrit également les différents leviers dont dispose l'AID, comme un fond d'investissement, un guichet unique pour les entreprises, et un accompagnement pour le passage à l'échelle.Mettant aussi l’accent sur le caractère exploratoire et donc de valeurs comme la curiosité et la tolérance à l'échec.
M. Sanchez, pour sa part, explique comment l'innovation civile est intégrée au Service de santé des armées. Il met l'accent sur la nécessité d'une "porosité" entre la recherche et l'innovation et sur l'importance de l'expérimentation pour tester les technologies existantes et identifier les solutions pertinentes. Il précise que le rôle de l'AID s'arrête une fois l'innovation testée et que le client final, en l'occurrence l'armée, reprend la main sur le processus.
Victor Prémaud témoigne de sa collaboration avec l'AID, qui a permis d'adapter ses produits aux besoins du Service de santé des armées. Il souligne les avantages mutuels de cette coopération et l'importance de répondre à la fois aux besoins du marché civil et à ceux du secteur de la défense.
- Le premier paradoxe concerne l'équilibre entre le partage et le contrôle des connaissances. Mme Merindol souligne la nécessité de partager davantage d'informations pour attirer les start-ups et les centres de recherche, tout en préservant le savoir militaire et en protégeant les informations sensibles.
- Le deuxième paradoxe concerne l'intégration des technologies et des dynamiques issues de l'innovation planifiée et de l'innovation ouverte. Ces deux approches fonctionnent différemment et s'adressent à des acteurs différents, mais sont essentielles pour développer des capacités militaires cohérentes. Elle évoque le concept d'"architectures technologiques de programme ouvertes", qui visent à intégrer des technologies civiles et militaires tout en maintenant la modularité et en gérant la complexité.
- Le troisième paradoxe, et le plus important, porte sur la sécurité des approvisionnements. Mme Merindol souligne qu'il est crucial de repenser la sécurité des approvisionnements. Trois pistes de réflexion sont possible à ses yeux: revenir à une logique de sources d'approvisionnement multiples et diversifiées, concevoir des architectures technologiques capables de fonctionner avec des systèmes dégradés, et repenser la sécurité des approvisionnements à l'échelle nationale, en intégrant les technologies critiques utilisées à la fois dans le secteur civil et militaire.
M. Gouillard, de l'Agence Innovation Défense (AID), développe le rôle de l’agence dans la promotion de l'innovation ouverte et la captation de l'innovation civile. L'AID intègre à la fois l'innovation planifiée et l'innovation ouverte, ce qui la distingue d'autres structures. M. Gouillard met en avant l'importance du marché dual pour les start-ups qui collaborent avec la défense, comme gage de sécurité économique et d’indépendance. Il décrit également les différents leviers dont dispose l'AID, comme un fond d'investissement, un guichet unique pour les entreprises, et un accompagnement pour le passage à l'échelle.Mettant aussi l’accent sur le caractère exploratoire et donc de valeurs comme la curiosité et la tolérance à l'échec.
M. Sanchez, pour sa part, explique comment l'innovation civile est intégrée au Service de santé des armées. Il met l'accent sur la nécessité d'une "porosité" entre la recherche et l'innovation et sur l'importance de l'expérimentation pour tester les technologies existantes et identifier les solutions pertinentes. Il précise que le rôle de l'AID s'arrête une fois l'innovation testée et que le client final, en l'occurrence l'armée, reprend la main sur le processus.
Victor Prémaud témoigne de sa collaboration avec l'AID, qui a permis d'adapter ses produits aux besoins du Service de santé des armées. Il souligne les avantages mutuels de cette coopération et l'importance de répondre à la fois aux besoins du marché civil et à ceux du secteur de la défense.
Conclusion
Pour résumer, on peut dire que les défis de la collaboration civilo-militaire n’est pas sans obstacles. Parmi les principaux défis évoqués, ont peut en identifier trois :
- en amont, la mise en place une politique de sécurité des approvisionnements (supply chain),
- une politique de protection de la propriété intellectuelle,
- enfin une coordination des initiatives à l’échelle européenne.
Les intervenants ont plaidé pour une meilleure intégration des efforts français et européens afin de maximiser le potentiel de l'innovation civile au profit des armées. « Au-delà de la Technologie, nous devons avoir une vision Holistique de l’Innovation ».
Un point marquant de la conférence a été l’appel à ne pas restreindre l’innovation à sa seule dimension technologique. Les innovations organisationnelles, particulièrement dans le domaine de la santé, jouent un rôle essentiel pour répondre aux besoins opérationnels des armées.
La conférence "Innovation Civile et Militaire" a révélé les enjeux et les opportunités liés à une collaboration renforcée entre ces deux sphères. Dans un contexte géopolitique complexe et en perpétuelle évolution, l’ouverture aux solutions civiles apparaît comme une nécessité stratégique. Ce rapprochement est un levier incontournable pour garantir la supériorité technologique et opérationnelle des armées françaises.
Pour en savoir plus
En 2022, Claire Lucas et Pierre Marion du Think Tank la "Fabrique de l'industrie", dans leur ouvrage généraliste "Recherche et innovation : comment rapprocher sphères publique et privée ?", se penchent sur la question du rapprochement entre la recherche publique et les entreprises. Les auteurs constataient que malgré les nombreux dispositifs mis en place, la coopération restait limitée en France. Ce constat faisait écho aux discussions menées lors de la conférence "Innovation Civile et Militaire" du 27 novembre 2024. L'événement met en lumière l'évolution des synergies croissantes entre le monde civil et militaire en matière d'innovation, et le chemin parcouru, soulignant l'importance des innovations civiles pour renforcer la supériorité technologique des armées. Les intervenants, comme Valérie Merindol, insistent sur ce changement de paradigme : l'innovation ne circule plus uniquement du militaire vers le civil, mais dans les deux sens, impliquant un écosystème d'acteurs plus large. Ce constat de nécessité de rapprochement entre les sphères publique et privée, au cœur de l'ouvrage de Lucas et Marion, se retrouve donc également au cœur de la collaboration civilo-militaire, illustrant une tendance et un besoin plus large de l'innovation à s'ouvrir à de nouveaux acteurs et de nouveaux modèles de collaboration.
Lire le rapport en ligne : ici.
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