
Rémy Pautrat
Je ne reviendrai pas sur son action, fondatrice à de nombreux égards, en Normandie au milieu des années 1990. D’autres en ont été les témoins et les acteurs. Mais, pour ce dont je peux, modestement, témoigner, Rémy Pautrat est toujours resté attentif, disponible et sensible à ce que, les uns et les autres, nous pouvions entreprendre en région ou au niveau local ; parfois dans de grandes difficultés, voire dans l’incompréhension de bien des acteurs. Son soutien était toujours acquis et ses conseils précieux.
Ainsi, quand M. Jean-Guy Bernard, alors Directeur général de l’EM Normandie, décida en 2010 d’engager fortement son école sur le terrain de l’IE (par la formation, l’enseignement et l’intervention territoriale), puis de créer sa Lettre d’intelligence économique en 2012, c’est tout naturellement que nous nous sommes tournés vers Rémy Pautrat pour le premier numéro de janvier 2013. Il accepta immédiatement.
Ainsi, quand M. Jean-Guy Bernard, alors Directeur général de l’EM Normandie, décida en 2010 d’engager fortement son école sur le terrain de l’IE (par la formation, l’enseignement et l’intervention territoriale), puis de créer sa Lettre d’intelligence économique en 2012, c’est tout naturellement que nous nous sommes tournés vers Rémy Pautrat pour le premier numéro de janvier 2013. Il accepta immédiatement.
"Toute démarche d’intelligence [territoriale] repose sur l’idée d’anticipation et de partage, avec en toile de fond la volonté d’accomplissement d’un destin commun »
En relisant ce premier numéro, deux points me paraissent évidents : la sûreté de son jugement quant à causes profondes des difficultés françaises pour se positionner dans la mondialisation ; la pertinence de sa définition de l’intelligence territoriale, évacuant toute vision purement instrumentale et se positionnant uniquement sur les terrains stratégique et éthique, voire civique.
Ainsi, à la fin de cette interview[[1] , il insistait sur le fait que « toute démarche d’intelligence [territoriale] repose sur l’idée d’anticipation et de partage, avec en toile de fond la volonté d’accomplissement d’un destin commun ». Précisant sa pensée, il soulignait : « Il faut donc arriver à faire naître une culture commune de développement. Les outils suivront, […]. Mais prioritairement, il doit exister une authentique volonté de vivre ensemble sur un même territoire, et de se projeter dans l’avenir autour d’un projet commun. Ce qui suppose une vision sur le long terme […] ».
Chacun identifiera dans ce propos les soubassements éthiques et civiques (ou politiques, mais au sens strict de la Polis grecque) de sa vision de l’intelligence territoriale, bien proche de ce que quelques géographes ont appelé la « géoéthique » ; c’est-à-dire l’établissement d’un lien entre des valeurs pour guider l’action et la vie d’une population sur un territoire, servie par cette action. En tout état de cause, la Lettre de l’EM Normandie s’est appuyée pendant dix ans sur cette ligne directrice.
Ainsi, à la fin de cette interview[[1] , il insistait sur le fait que « toute démarche d’intelligence [territoriale] repose sur l’idée d’anticipation et de partage, avec en toile de fond la volonté d’accomplissement d’un destin commun ». Précisant sa pensée, il soulignait : « Il faut donc arriver à faire naître une culture commune de développement. Les outils suivront, […]. Mais prioritairement, il doit exister une authentique volonté de vivre ensemble sur un même territoire, et de se projeter dans l’avenir autour d’un projet commun. Ce qui suppose une vision sur le long terme […] ».
Chacun identifiera dans ce propos les soubassements éthiques et civiques (ou politiques, mais au sens strict de la Polis grecque) de sa vision de l’intelligence territoriale, bien proche de ce que quelques géographes ont appelé la « géoéthique » ; c’est-à-dire l’établissement d’un lien entre des valeurs pour guider l’action et la vie d’une population sur un territoire, servie par cette action. En tout état de cause, la Lettre de l’EM Normandie s’est appuyée pendant dix ans sur cette ligne directrice.
Attentif et critique, bienveillant et pénétrant, Rémy Pautrat, appuyé par Philippe Clerc, nous apporta bien des éclairages...
Autre exemple de l’engagement au long cours de Rémy Pautrat au service des territoires, notamment ceux qu’il connaissait de près : son soutien dans le cadre du projet multi-établissements de Campus IE Basse-Normandie (les régions n’étaient pas encore fusionnées).
Ce projet, qui était une expérimentation de la formation à l’IE sur le territoire, était copiloté par l’ENSICAEN (et plus particulièrement par notre regretté collègue Sylvain Anger-Valognes †2021) et l’EM Normandie (dont j’étais alors le référent IE). En dehors des questions opérationnelles – au demeurant fort complexes – il nous était vite apparu qu’il y avait nécessité à recueillir le soutien et le conseil de personnalités de premier plan pour nous guider ; ceci avec l’accord de nos interlocuteurs côté État et Région.
C’est ainsi que Rémy Pautrat, accompagné de Philippe Clerc, répondit présent. Je me souviens en particulier de cette réunion au cours de laquelle, à Caen, nous avions passé quelques heures à réviser tous les quatre le référentiel de formation en vue de cette expérimentation. Attentif et critique, bienveillant et pénétrant, Rémy Pautrat, appuyé par Philippe Clerc, nous apporta bien des éclairages et bien des compléments qui nous faisaient défaut. Bien d’autres échanges s’ensuivirent au fil des années
Ce projet, qui était une expérimentation de la formation à l’IE sur le territoire, était copiloté par l’ENSICAEN (et plus particulièrement par notre regretté collègue Sylvain Anger-Valognes †2021) et l’EM Normandie (dont j’étais alors le référent IE). En dehors des questions opérationnelles – au demeurant fort complexes – il nous était vite apparu qu’il y avait nécessité à recueillir le soutien et le conseil de personnalités de premier plan pour nous guider ; ceci avec l’accord de nos interlocuteurs côté État et Région.
C’est ainsi que Rémy Pautrat, accompagné de Philippe Clerc, répondit présent. Je me souviens en particulier de cette réunion au cours de laquelle, à Caen, nous avions passé quelques heures à réviser tous les quatre le référentiel de formation en vue de cette expérimentation. Attentif et critique, bienveillant et pénétrant, Rémy Pautrat, appuyé par Philippe Clerc, nous apporta bien des éclairages et bien des compléments qui nous faisaient défaut. Bien d’autres échanges s’ensuivirent au fil des années
Une marque profonde laissée par Rémy Pautrat depuis son passage à Caen à milieu des années 1990
Je crois que l’on peut affirmer que si aujourd’hui il y a toujours une politique IE régionale en Normandie, c’est en bonne partie grâce à la marque profonde laissée par Rémy Pautrat depuis son passage à Caen à milieu des années 1990. Il est impossible de tous les nommer ici, mais de nombreux professionnels – encore en activité pour certains – lui doivent leur engagement pour la diffusion de l’IE au service des territoires et de leurs PME/PMI et ETI.
Je pense notamment à la mission SPIE de la Région Normandie, pilotée par Philippe Hugo et, encore récemment, Jean-Pierre Larcher ; à Stéphane Bresson, aujourd’hui responsable du Département Normandie Cyber à l’Agence de Développement pour la Normandie ; à Rémy Laurent qui pilote un dispositif d’intelligence collective en agriculture (INCA) à la Chambre Régionale d’Agriculture de Normandie.
Je pense aussi au soutien éclairé de responsables politiques, notamment Mme Sophie Gaugain, 1ère Vice-Présidente de la Région Normandie. Il faudrait en citer beaucoup d’autres, comme des membres des associations d’auditeurs IHEDN, des agents de l’État en région, mais aussi des professionnels qui opèrent encore aujourd’hui dans le privé, des formateurs et enseignants dans différentes écoles ou composantes universitaires, etc.
Toute cette dynamique, insufflée par Rémy Pautrat au milieu des années 1990 trouve ses prolongements, ses continuations, dans la période récente, dans des projets comme une thèse de doctorat CIFRE[[2]] (financée par la Région Normandie) et un MOOC (Université de Caen et Région Normandie).
Je pense notamment à la mission SPIE de la Région Normandie, pilotée par Philippe Hugo et, encore récemment, Jean-Pierre Larcher ; à Stéphane Bresson, aujourd’hui responsable du Département Normandie Cyber à l’Agence de Développement pour la Normandie ; à Rémy Laurent qui pilote un dispositif d’intelligence collective en agriculture (INCA) à la Chambre Régionale d’Agriculture de Normandie.
Je pense aussi au soutien éclairé de responsables politiques, notamment Mme Sophie Gaugain, 1ère Vice-Présidente de la Région Normandie. Il faudrait en citer beaucoup d’autres, comme des membres des associations d’auditeurs IHEDN, des agents de l’État en région, mais aussi des professionnels qui opèrent encore aujourd’hui dans le privé, des formateurs et enseignants dans différentes écoles ou composantes universitaires, etc.
Toute cette dynamique, insufflée par Rémy Pautrat au milieu des années 1990 trouve ses prolongements, ses continuations, dans la période récente, dans des projets comme une thèse de doctorat CIFRE[[2]] (financée par la Région Normandie) et un MOOC (Université de Caen et Région Normandie).
La « citoyenneté économique »
Rémy Pautrat mena bien d’autres actions auprès des acteurs territoriaux et locaux. Ainsi, nombreux sont celles et ceux qui auront des témoignages à apporter sur l’action opiniâtre de ce grand serviteur de l’intérêt de ses concitoyens. Je ne crois pas l’avoir jamais entendu le formuler ainsi, mais Rémy Pautrat reste – me semble-t-il – l’incarnation la plus exacte et la plus intègre de ce que nous avons proposé d’appeler la « citoyenneté économique ».
Merci pour ce témoignage.
A propos de l'auteur Ludovic JEANNE
Notes :
[[1]] L’auteur souligne.
[[2]] Convention industrielle de formation par la recherche.