RSE et Economie collaborative

La gouvernance, clé de voûte d’une CSRD réellement transformative. Par Christophe Pouilly

Table-ronde lors du Salon Produrable


Jacqueline Sala


Dans cette table ronde, c’est le sujet de la gouvernance et de son impact sur la CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive) qui était débattu par Laurence BRETON-KUENY (Vice-présidente de l'ANDRH et DRH de l’AFNOR) ; Emmanuelle CORDANO (Fondatrice et experte comptable de CSR4FINANCE) ; Pierre DEHEUNYNCK Directeur général du cabinet RICOL LASTEYRIE) ; Anne-Hélène MONSELLATO (Administratrice indépendante et présidente du comité d'audit GENFIT).




Les intervenants

Rappelons que cette directive européenne fixe de nouvelles normes et obligations de reporting extra-financier dès 2025 pour les grandes entreprises (plus de 500 salariés, plus de 50 millions€ de chiffre d'affaires ou PME cotées en Bourse). Ce reporting porte sur les données ESG de l'entreprise soit :
. Facteurs environnementaux : atténuation et adaptation au changement climatique, biodiversité, utilisation des ressources... ;
. Facteurs sociaux : égalité des chances, conditions de travail et respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales... ;
. Facteurs de gouvernance : rôle des organes d'administration, activités de lobbying, gestion des relations avec les partenaires commerciaux...

 
La gouvernance, clé de voûte d’une CSRD réellement transformative. Par Christophe Pouilly

Gouvernance de la CSRD : à qui la rattacher ?

DG, DRH, DAF, ou autres directions fonctionnelles… confier le pilotage et la mise en œuvre de sa CSRD a une direction en particulier aura forcément un impact. « Les DRH auront forcément une sensibilité plus sociale et les DAF plus économique » confirme Emmanuelle CORDANO qui précise que l’acculturation des Directions administratives et financières à la notion de durabilité est encore loin d’être acquise.  Quelle que soit la direction impliquée « Il existe une sorte de sidération face à l’ampleur de la tâche » ajoute Anne-Hélène MONSELLATO qui précise que « Le reporting permet de mettre en évidence l’ensemble des problèmes posés mais il va savoir aller au-delà ».

Difficulté soulignée par Laurence BRETON-KUENY qui évoque notamment le manque d’homogénéité des indicateurs au niveau européen et l’importance de prendre en compte l’impact Humain dans la CSRD. Elle note également le peu de place prise par le facteur "salaire" qui constitue pourtant un des enjeux majeurs auxquels doivent faire face les DRH dans leurs entreprises.

Ceci étant, prévient Pierre DEHEUNYNCK « La transversalité est importante. Plus que le rattachement à telle ou telle direction, c’est la vision derrière la CSRD qui compte et sa dimension collective ».

Taxonomie : un outil majeur de gouvernance

Face à l’ampleur de la tâche, Emmanuelle CORDANO insiste sur l’importance de s’appuyer sur la taxonomie émise par l’Union Européenne qui constitue pour elle, un « véritable référentiel ». Ce système de classification permet de déterminer à quelles conditions une activité économique peut être considérée comme contribuant substantiellement à l’atténuation du changement climatique et si cette activité ne cause de préjudice important à aucun des autres objectifs environnementaux (à savoir : l’utilisation durable et protectrice des ressources aquatiques et marines, la transition vers une économie circulaire, la prévention et la réduction de la pollution, la protection et la restauration la biodiversité. 70 secteurs sont recensés dans cette taxonomie verte.

Emmanuelle ne le précise pas mais le règlement publié à cet effet dans le Journal officiel de l’Union européenne fait… 349 pages (NDLR).

Quels bénéfices attendre de la CSRD ?

« La publication des rapports va permettre d’avoir une comparabilité des données par entreprise et par secteur d’activité » affirme Anne-Hélène MONSELLATO. Elles vont même pouvoir se traduire par de véritables ‘Mapping des chaînes de valeurs’ ajoute Pierre DEHEUNYNCK.

Les intervenants s’accordent sur le fait que la CSRD participent à faire prendre conscience aux entreprises qu’elles doivent faire face à des enjeux globaux. D’où l’importance de mobiliser tous les acteurs de leur chaîne de valeur. C’est également le moment où le lien entre ‘Financier’ et ’Durabilité’ doit se faire indéfectible.

Cela tombe bien car, chacun en est conscient, il y a urgence.

 

Remarque personnelle

En 2025, près de 10.000 entreprises dans l’UE auront un devoir de publication d’un rapport dit de ‘Durabilité’ obéissant aux critères énoncés ci-dessus. En 2026 ce sera plus de 50 000 entreprises de plus de 250 salariés qui seront concernées. L’analyse de ces rapports donnera une image assez précise de la politique "durable", au sens large du terme, mise en œuvre aujourd’hui.

L’établissement de ces rapports est plus vécu aujourd’hui comme une contrainte. C’est dommage. Portée par une volonté d’ouverture, de remise en question et de créativité, elle pourrait s’avérer  également source de nouvelles opportunités.

Merci Christophe Pouilly pour votre témoignage.

La gouvernance, clé de voûte d’une CSRD réellement transformative. Par Christophe Pouilly
Christophe Pouilly est le Vice-Président exécutif de La Fabrique du Futur & Co. Il assure la direction opérationnelle de ce "Do Tank" qui compte 57 associés aux expertises transdisciplinaires. Sa mission : aider les structures (publiques ou privées) à se projeter dans le futur et les accompagner dans leurs grandes transitions. Membre de la Société Française de Prospective et l'Association of Professionnel Futurists, Christophe est également formateur au sein de l'organisme de formation (certifié Qualiopi) de la Fabrique du Futur.