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Réindustrialisation de la France à l’horizon 2035 : besoins, contraintes et effets potentiels. Patrick Cuenot


Jacqueline Sala
Lundi 22 Juillet 2024


Des décennies de nationalisations et de sauvetages n'ont pas empêché la perte de 2,5 millions d'emplois industriels depuis les années 1970. Cependant, les récents chocs mondiaux ont créé un consensus politique sur la nécessité de renforcer l'industrie française. 'industrie est désormais vue comme un bras armé de la souveraineté, un atout pour la transition écologique et un créateur de valeur et d'emplois.



Patrick Cuenot est formateur, coach et consultant en Veille stratégique.
Il intervient à l'ARML-IdF
L’Association Régionale des Missions Locales d’Ile-de-France consolide l'action des 61 Missions Locales en Île-de-France

Industrie, bras armé de la souveraineté, atout pour la transition écologique et créateur de valeur et d'emplois.

La France, malgré sa forte désindustrialisation, a toujours été préoccupée par sa politique industrielle.
Des décennies de nationalisations et de sauvetages n'ont pas empêché la perte de 2,5 millions d'emplois industriels depuis les années 1970. Cependant, les récents chocs mondiaux ont créé un consensus politique sur la nécessité de renforcer l'industrie française.

L'industrie est désormais vue comme un bras armé de la souveraineté, un atout pour la transition écologique et un créateur de valeur et d'emplois. Le Président Emmanuel Macron a fait de la réindustrialisation une priorité, mettant en place des mesures pro-entreprises telles que la réduction des impôts de production, le soutien à l'innovation et la simplification des procédures d'installation.
Les investisseurs étrangers sont également courtisés lors d'événements annuels.
 

Vers une reconquête industrielle

Par ailleurs, le 11 mai 2023, Emmanuel Macron a présenté la stratégie de réindustrialisation de la France, visant à en faire la championne de l'industrie verte en Europe.
Le programme "Territoires d'industrie" joue un rôle clé dans cette ambition, avec une industrie souveraine et décarbonée ancrée localement. Les acteurs locaux sont au cœur du projet, avec quatre axes principaux : accélérer la transition écologique, créer des écosystèmes d'innovation, lever les freins au recrutement et mobiliser un foncier industriel adapté.

Ce programme offre un soutien renforcé en animation, un chef de projet pour chaque territoire, de nouvelles modalités de financement et une offre complète d'ingénierie. Un investissement de 100 millions d'euros sera déployé dans le cadre du Fonds Vert pour des projets industriels structurants et ambitieux sur le plan environnemental.
 

Cependant, la réindustrialisation européenne n'est pas du goût de tout le monde.

EPITROPAKIS Roman (CAPITAL) - La stratégie des Américains pour attirer les industriels européens sur leur sol.
EPITROPAKIS Roman (CAPITAL) - La stratégie des Américains pour attirer les industriels européens sur leur sol.
Ainsi, aux États-Unis, des milliards de dollars de subventions sont versés pour encourager les investissements dans les industries de la transition énergétique, dans le cadre de l'Inflation Reduction Act (IRA). Ce plan fédéral, doté d'un budget estimé à plus de 1000 milliards de dollars, vise à réduire les émissions de gaz à effet de serre et à contrer l'avancée de la Chine dans les industries vertes.

Les mesures protectionnistes incluses dans l'IRA incitent les industriels européens à délocaliser leurs projets d'investissement aux États-Unis. Face à cette concurrence, l'Union européenne a allégé ses mesures anticoncurrentielles et propose des subventions similaires à celles offertes par les pays tiers.

Toutefois, les subventions européennes sont plus axées sur la recherche et développement et les technologies innovantes, tandis que l'IRA cible davantage les grosses industries établies. Les délais et la lourdeur administrative des procédures de subventions en Europe sont également un frein pour les investisseurs. En réponse, l'Union européenne a présenté le Net Zero Industry Act (NZIA) pour réduire ces obstacles et fixer un objectif ambitieux de 40% de technologies vertes fabriquées en Europe d'ici 2030.

8 scénarios de réindustrialisation, analysant leurs impacts en termes de main-d'œuvre, énergie, ressources naturelles, et émissions de CO2. Télécharger le Rapport

"Réindustrialisation de la France à l’horizon 2035 : besoins, contraintes et effets potentiels" publié par France Stratégie explore divers scénarios de réindustrialisation, analysant leurs impacts en termes de main-d'œuvre, énergie, ressources naturelles, et émissions de CO2.
Huit scénarios sont construits, variant selon la part de la valeur ajoutée manufacturière dans le PIB (8%, 10%, 12%, 15%) et le type de branches industrielles (technologiques, amont, aval). Les scénarios de forte réindustrialisation prévoient une augmentation significative de l'emploi, notamment pour les ouvriers qualifiés, techniciens, ingénieurs, et cadres.

La décarbonation de l'industrie est envisagée par l'efficacité énergétique, l'électrification, et l'utilisation de la biomasse.
Les besoins en électricité augmenteraient, nécessitant une forte croissance des énergies renouvelables.
Les ressources en sol et eau seraient sous pression, avec des besoins croissants en foncier industriel et en eau.
Les scénarios montrent des réductions potentielles des émissions de gaz à effet de serre, bien que des défis subsistent pour atteindre ces objectifs.
 

Dans les dix prochaines années, la réindustrialisation de la France pourrait engendrer des changements significatifs sur le marché de l'emploi et des compétences.

Jusqu'à 740,000 emplois industriels pourraient voir le jour d'ici 2035, avec une demande accrue pour les ouvriers qualifiés, les techniciens, les ingénieurs et les cadres. Cette tendance s'accompagnerait d'une augmentation de l'emploi dans les secteurs industriels, en particulier dans les branches technologiques et aval.

Parallèlement à cette croissance, les besoins en compétences techniques et en ingénierie connaîtraient une hausse significative, notamment pour les métiers liés à la décarbonation et à l'innovation technologique. Cependant, il convient de noter que certaines tensions sur le marché du travail pourraient survenir pour certains métiers industriels, en raison des départs en retraite et de l'attractivité limitée des métiers les moins qualifiés.

En ce qui concerne l'accompagnement social, les choix adoptés pour la réindustrialisation pourraient avoir un impact considérable. On pourrait observer une augmentation des besoins en accompagnement pour la reconversion professionnelle, en particulier pour les travailleurs des secteurs en déclin. De plus, les dispositifs de formation continue seraient renforcés pour développer les compétences nécessaires à la nouvelle industrie. Les politiques de soutien social pourraient également être accentuées pour aider les travailleurs confrontés à la transition industrielle.
 

Le marché du conseil en évolution professionnelle en forte croissance.

Il pourrait connaître une croissance des services de conseil en reconversion et formation professionnelle, afin d'accompagner la transition vers les nouveaux métiers industriels.
Des programmes spécialisés dans les compétences en technologies avancées et en gestion de l'énergie pourraient être développés. De plus, les partenariats avec les entreprises industrielles pourraient s'intensifier pour aligner les formations sur les besoins du marché.

D'autre part, les structures alternatives ou concurrentes aux acteurs historiques du conseil en évolution professionnelle pourraient proposer des offres spécifiques telles que des programmes de formation spécialisés en technologies industrielles avancées et en décarbonation. Elles pourraient également offrir des services de reconversion professionnelle pour les travailleurs des secteurs en déclin et un accompagnement personnalisé pour les jeunes et les travailleurs en transition, incluant des stages et des apprentissages en entreprise.

Enfin, les conseillers en accompagnement social et en insertion professionnelle devront développer certaines compétences clés. Parmi celles-ci, une connaissance approfondie des technologies industrielles avancées et des processus de décarbonation, des compétences en gestion de projet et en accompagnement de la transition professionnelle, ainsi que des capacités d'analyse des besoins du marché du travail et des compétences émergentes.
 

SOURCES

FRANCE STRATEGIE - Réindustrialisation de la France à l’horizon 2035 : besoins, contraintes et effets potentiels

MINISTERE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES - Le Gouvernement sélectionne 183 nouveaux territoires d’industrie pour réindustrialiser la France

EPITROPAKIS Roman (CAPITAL) - La stratégie des Américains pour attirer les industriels européens sur leur sol
 

L'auteur : Patrick Cuenot est un formateur, coach et consultant spécialisé dans la veille stratégique.

 Il a suivi une formation en Intelligence Économique et Analyse Stratégique à l’EISTI en 2008/2009.  Ensuite, il a travaillé dans un cabinet de conseil en stratégie de communication en ligne, où il a réalisé des audits d’e-réputation pour des entreprises du CAC 40 et développé une méthodologie d’analyse de données.

En tant que formateur, il dispense des formations aux étudiants en dernière année d’études (MASTER ou MASTERE) ainsi qu’aux entreprises pour optimiser leur pratique de la recherche de données en ligne. Ce qui ne l'empêche pas de mener un parcours de     consultant. Il réalise des prestations de veille pour divers secteurs, principalement la formation initiale et continue.

Il accompagne les professionnels dans l’amélioration de leurs compétences en veille stratégique. Patrick Cuenot a développé une méthodologie d’analyse de données qui combine à la fois des techniques quantitatives et qualitatives. Cette méthodologie a été mise en place au sein de la société e-Walking, où il a travaillé sur la collecte et l’analyse des opinions des internautes.