Auteur : Nicolas Moinet
Pourtant, l’intelligence économique est une nécessité vitale pour nos entreprises et nos territoires. Attention donc à ne pas décimer le troupeau sous prétexte qu’il y a en son sein quelques brebis galeuses… surtout quand ces brebis sont venues malicieusement s’y mêler pour donner d’elles une image respectable.
Pour une organisation, faire de l’intelligence économique consiste à surveiller de manière systématique son environnement à partir d’informations ouvertes (obtenues légalement), protéger son patrimoine immatériel (informations mais aussi image), manager ses connaissances et mener des opérations d’influence (lobbying, normalisation…). Si la plupart des entreprises font, comme Monsieur Jourdain faisait de la prose, de l’intelligence économique sans le savoir, l’enjeu est d’aujourd’hui pour la grande majorité d’entre elles d’améliorer leurs pratiques, de développer celles qui ont pu être délaissées et de les mettre en musique dans le cadre d’une démarche globale. Du côté des territoires et de l’Etat, l’intelligence économique est une politique publique qui, sous la houlette des Préfets de Région, vise à mettre en réseau les acteurs du développement afin d’anticiper les mutations, parer les menaces et profiter des opportunités (l’idée de pôle de compétitivité est en elle-même un exemple d’intelligence économique). Ce défi implique, tant dans les entreprises que les organismes publics, un renouvellement de la pensée stratégique et du management (par exemple, le partage des connaissances doit l’emporter sur la rétention d’informations). Dans des environnements turbulents que certains décideurs qualifient de « guet-apens permanent », rester un Monsieur Jourdain de l’intelligence économique ne permet plus de rester compétitif.
S’il est évident que l’intelligence économique n’est pas la pierre philosophale du développement des entreprises et des territoires, elle en devient néanmoins peu à peu la clé de voute. Seule, l’intelligence économique ne peut pas grand-chose. A quoi sert-il d’avoir des renseignements sur l’adversaire si on ne dispose pas de capacités crédibles ? Mais à l’inverse, il existe des potentiels (et la France n’en manque pas !) qui ne se réalisent jamais faute d’intelligence. A quoi sert-il d’avoir le meilleur avion de combat du monde si personne ne l’achète ? A quoi sert-il d’avoir le meilleur dossier aux JO si le CIO ne vote pas pour lui ? A quoi sert-il de favoriser la création d’entreprises innovantes si leurs technologies sont pillées ou rachetées ? Et les exemples ne manquent pas… Impliquant un nécessaire changement de mentalité, l’intelligence économique est un défi collectif, un nouveau scénario dont le premier rôle revient aux chefs d’entreprise, politiques, fonctionnaires… Mais sans professionnels, ces responsables ne peuvent pas grand-chose. C’est pourquoi la France forme chaque années plusieurs centaines de spécialistes de l’intelligence économique tant en formation initiale (Masters d’université ou de grandes écoles) que continue. Ces professionnels savent organiser un système global de recueil, traitement, diffusion et protection de l’information stratégique. Ils travaillent dans des grands groupes, des PME, des agences de développement économique, des cabinets de conseil… Leur quotidien : mettre en œuvre des logiciels de veille, organiser des réunions d’experts, sensibiliser le personnel à la sécurité économique, manager les connaissances (voir sur http://uptv.univ-poitiers.fr le récent colloque organisé à l’Université de Poitiers sur les métiers de l’intelligence économique). Rien à voir avec ces pratiques « barbouzardes » qui défraient la chronique judiciaire et jettent l’opprobre sur l’ensemble d’une profession. Condamnables, de telles dérives ne sont-elles pas d’ailleurs inhérentes à toute pratique ? Mais le plus grave est que les cabinets incriminés ne font absolument pas d’intelligence économique (terme est souvent écrit d’ailleurs entre guillemets !) et n’ont pas en leur sein de professionnels formés à ces pratiques légales et éthiques. Attention donc au mélange des genres et gardons nous bien de ne pas jeter le bébé avec l’eau du bain.
Nicolas Moinet
Maître de conférences à l’Université de Poitiers
Pour une organisation, faire de l’intelligence économique consiste à surveiller de manière systématique son environnement à partir d’informations ouvertes (obtenues légalement), protéger son patrimoine immatériel (informations mais aussi image), manager ses connaissances et mener des opérations d’influence (lobbying, normalisation…). Si la plupart des entreprises font, comme Monsieur Jourdain faisait de la prose, de l’intelligence économique sans le savoir, l’enjeu est d’aujourd’hui pour la grande majorité d’entre elles d’améliorer leurs pratiques, de développer celles qui ont pu être délaissées et de les mettre en musique dans le cadre d’une démarche globale. Du côté des territoires et de l’Etat, l’intelligence économique est une politique publique qui, sous la houlette des Préfets de Région, vise à mettre en réseau les acteurs du développement afin d’anticiper les mutations, parer les menaces et profiter des opportunités (l’idée de pôle de compétitivité est en elle-même un exemple d’intelligence économique). Ce défi implique, tant dans les entreprises que les organismes publics, un renouvellement de la pensée stratégique et du management (par exemple, le partage des connaissances doit l’emporter sur la rétention d’informations). Dans des environnements turbulents que certains décideurs qualifient de « guet-apens permanent », rester un Monsieur Jourdain de l’intelligence économique ne permet plus de rester compétitif.
S’il est évident que l’intelligence économique n’est pas la pierre philosophale du développement des entreprises et des territoires, elle en devient néanmoins peu à peu la clé de voute. Seule, l’intelligence économique ne peut pas grand-chose. A quoi sert-il d’avoir des renseignements sur l’adversaire si on ne dispose pas de capacités crédibles ? Mais à l’inverse, il existe des potentiels (et la France n’en manque pas !) qui ne se réalisent jamais faute d’intelligence. A quoi sert-il d’avoir le meilleur avion de combat du monde si personne ne l’achète ? A quoi sert-il d’avoir le meilleur dossier aux JO si le CIO ne vote pas pour lui ? A quoi sert-il de favoriser la création d’entreprises innovantes si leurs technologies sont pillées ou rachetées ? Et les exemples ne manquent pas… Impliquant un nécessaire changement de mentalité, l’intelligence économique est un défi collectif, un nouveau scénario dont le premier rôle revient aux chefs d’entreprise, politiques, fonctionnaires… Mais sans professionnels, ces responsables ne peuvent pas grand-chose. C’est pourquoi la France forme chaque années plusieurs centaines de spécialistes de l’intelligence économique tant en formation initiale (Masters d’université ou de grandes écoles) que continue. Ces professionnels savent organiser un système global de recueil, traitement, diffusion et protection de l’information stratégique. Ils travaillent dans des grands groupes, des PME, des agences de développement économique, des cabinets de conseil… Leur quotidien : mettre en œuvre des logiciels de veille, organiser des réunions d’experts, sensibiliser le personnel à la sécurité économique, manager les connaissances (voir sur http://uptv.univ-poitiers.fr le récent colloque organisé à l’Université de Poitiers sur les métiers de l’intelligence économique). Rien à voir avec ces pratiques « barbouzardes » qui défraient la chronique judiciaire et jettent l’opprobre sur l’ensemble d’une profession. Condamnables, de telles dérives ne sont-elles pas d’ailleurs inhérentes à toute pratique ? Mais le plus grave est que les cabinets incriminés ne font absolument pas d’intelligence économique (terme est souvent écrit d’ailleurs entre guillemets !) et n’ont pas en leur sein de professionnels formés à ces pratiques légales et éthiques. Attention donc au mélange des genres et gardons nous bien de ne pas jeter le bébé avec l’eau du bain.
Nicolas Moinet
Maître de conférences à l’Université de Poitiers